En matière de loyers plafonnés, il doit exister en droit interne un mécanisme garantissant le respect d’un juste équilibre entre l’intérêt particulier des bailleurs et l’intérêt général de la communauté.
Des propriétaires fonciers se sont vus opposer une impossibilité d’augmenter le loyer des locataires de leurs terres en raison d’une modification de la législation qui les a obligés à prolonger les baux dans les mêmes conditions que précédemment, sans limite de durée.
Dans un arrêt du 12 juin 2012, la Cour européenne des droits de l’Homme relève qu’il n’a pas été procédé à une étude spécifique de la question de savoir si la modification de l’article qui régit la prolongation du type de bail foncier en cause dans le cas des requérants respectait un juste équilibre entre les intérêts respectifs des bailleurs et des locataires.
De fait, dans le cadre des différents baux tels qu’ils ont été prolongés en vertu de cet article de la loi sur les baux fonciers, les requérants ont perçu des loyers particulièrement bas, correspondant à moins de 0,25 % de la valeur marchande de leurs terres.
En effet, la prolongation des baux conclus par les requérants est valable pour une durée indéterminée, sans autre possibilité d’ajustement positif que celle liée à l’indice des prix à la consommation. Il n’est donc pas possible, dans ces contrats, de tenir compte de la valeur du terrain pour fixer le niveau du loyer. Seul le locataire peut choisir de mettre fin au bail, soit en le résiliant soit en achetant le terrain à des conditions préférentielles.
Par ailleurs, il est libre de céder son bail à des tiers avec l’habitation s’y rattachant : en pareil cas, c’est à lui seul que profiterait toute augmentation de la valeur du terrain. Au contraire, un bailleur qui choisirait de vendre à un tiers sa créance sur le locataire ne bénéficierait pas de l’augmentation de la valeur du terrain, le loyer restant plafonné indéfiniment. Or la Cour considère que les requérants pouvaient légitimement s’attendre à ce que leurs baux expirent dans les conditions qui y étaient prévues, indépendamment des débats qui auraient pu naître ou des mesures législatives qui auraient pu être adoptées dans l’intervalle.
La Cour juge que l’interdiction d’augmenter les loyers a fait peser sur les propriétaires une charge financière disproportionnée par rapport à l’intérêt général de la communauté et que les autorités norvégiennes n’ont donc pas ménagé un juste équilibre entre les différents intérêts en jeu.