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À défaut d’organisation des élections, tout salarié peut demander réparation

Voici une décision qui devrait inciter les entreprises qui y sont soumises, à enclencher sans plus tarder le processus électoral.

En effet, la Cour de cassation vient de décider, dans un arrêt du 17 mai dernier, qu’en l’absence de procès-verbal de carence, tout salarié pourra engager la responsabilité civile de l’employeur remplissant les conditions pour les mise en place des institutions représentatives du personnel, et qui aurait manqué à son obligation. Le salarié peut désormais ainsi obtenir des dommages et intérêts, en raison du préjudice qu’il a nécessairement subi, tenant à la privation d’une possibilité de représentation et de défense de ses intérêts.

Absence de PV de carence

Dans cette affaire, un salarié avait été licencié pour faute grave après avoir présenté des décomptes horaires falsifiés et commis diverses malfaçons sur un chantier. Ayant porté l’affaire devant le Conseil de prud’hommes,  il demandait à être indemnisé au titre de la nullité de son licenciement (violation de la protection légale suite à un accident du travail pour lequel aucune visite de reprise n’avait été organisée) et des dommages et intérêts pour absence d’organisation des élections professionnelles. En effet, bien que les seuils d’effectif rendant obligatoire l’organisation de telles élections soient atteints, l’employeur s’était en effet gardé d’agir en ce sens, et il ne fournissait d’ailleurs aucun procès-verbal de carence attestant d’une quelconque tentative de mise en place.

Un salarié peut-il, à titre individuel, réclamer des dommages-intérêts sur la base d’un tel manquement de l’employeur ? Telle était la question posée.

En règle générale, ce sont les syndicats qui sont admis à agir sur la base d’un délit d’entrave à la mise en place des institutions représentatives (C. trav., art. L. 2316-1 et L. 2328-1)e t à réclamer des dommages-intérêts (Cass. soc., 7 mai 2002, n° 00-60.282). Un salarié ne peut obtenir qu’indirectement une indemnisation, dans des hypothèses strictement délimitées par la jurisprudence ou par le législateur, notamment :

  • en cas de licenciement pour inaptitude professionnelle prononcé sans que la formalité légale de consultation des délégués du personnel sur les possibilités de reclassement ait pu être observée : si l’employeur ne fournit pas de PV de carence, le salarié a droit à une indemnité au moins égale à 12 mois de salaires (Cass. soc., 7 décembre 1999, n° 97-43.106) ;
  • en cas de licenciement pour motif économique : le défaut d’information et de consultation du CE ou des DP, ouvre droit, en l’absence de PV de carence, à une indemnité au moins égale à un mois de salaire brut (C. trav., art. L. 1235-15).

Dans l’affaire ici rapportée, la cour d’appel a fait droit à la demande d’indemnisation liée à la nullité du licenciement. Elle a, en revanche, rejeté la demande portant sur l’indemnisation du défaut d’organisation des élections au motif que l’intéressé, « en tant que simple salarié, ne peut introduire des demandes relatives à la mise en place des institutions représentatives du personnel au sein de l’entreprise ».

Préjudice nécessairement subi

La Cour de cassation a censuré la dernière partie de l’arrêt et admis le droit de tout salarié d’engager la responsabilité civile de l’employeur (sur le fondement de l’article 1382 du Code civil), à raison de la carence fautive de ce dernier dans la mise en place des institutions représentatives.

Ainsi, d’après les Hauts magistrats, « l’employeur qui, bien qu’il y soit légalement tenu, n’accomplit pas les diligences nécessaires à la mise en place d’institutions représentatives du personnel, sans qu’un procès-verbal de carence ait été établi, commet une faute qui cause nécessairement un préjudice aux salariés, privés ainsi d’une possibilité de représentation et de défense de leurs intérêts ».

Ce principe résulte de l’application combinée de différents textes visés expressément par l’arrêt :

  • l’alinéa 8 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, qui garantit le droit de tout travailleur de participer, par l’intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu’à la gestion de l’entreprise ;
  • l’article 27 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne relatif au droit à l’information et à la consultation des travailleurs au sein de l’entreprise ;
  • l’article 8 § 1 de la directive 2002/14/CE du 11 mars 2002 établissant un cadre général relatif à l’information et la consultation des travailleurs dans la Communauté européenne. Selon ce texte, les États membres veillent à ce qu’il existe des procédures administratives ou judiciaires appropriées pour faire respecter les obligations découlant de la directive.

Si l’employeur n’est pas en mesure de fournir un procès-verbal de carence attestant d’une tentative infructueuse de doter l’entreprise d’une représentation du personnel, tout salarié peut donc se prévaloir en justice de la faute de l’employeur et engager sa responsabilité civile. Il sera assuré d’obtenir gain de cause puisqu’aux termes de l’arrêt, cette fautelui cause nécessairementun préjudice,celui d’avoir été privé d’une possibilité de représentation et de défense de leurs intérêts. Rien ne s’oppose d’ailleurs à ce qu’un salarié agisse en dehors de toute rupture de son contrat de travail.

Cass. soc., 17 mai 2011, n° 10-12.852

D’après Liaisons Sociales Quotidien

One Response to “À défaut d’organisation des élections, tout salarié peut demander réparation”
  1. La décision est dite très utile afin que tout employé ait son droit dans une élection


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